Je voudrais évoquer ici toute la souffrance que les grèves vont engendrer en cette période de fêtes dans nos régions déjà ravagées par les pluies. Ces intempéries que certains mettent injustement sur le dos de nos intempérances alors que j’ai mis des ampoules led partout dans la maison et que, depuis longtemps, je ferme le robinet pendant que je me frotte les dents au dentifrice bio.
Les trains sont bloqués, les poids lourds sont en rade et les navires aussi. Nos marchands seront- ils livrés à temps ? Les huitres seront-elles encore assez fraiches ? Les cadeaux commandés vont-ils arriver dans les délais ? Mais que fait Amazon ?
Quelle angoisse ! Et surtout y aura-t-il encore le choix ? Les mères, gavées des même publicités que leurs enfants, se tordent les doigts d’inquiétude ; quelle tête vont-ils faire si la console n’est pas une Nintendo, si le Lego n’est pas Ninjago, si la montre n’est pas connectée, si les Nike ne sont pas des « Air force one ». Que faire d’un banal Monopoly s’il n’est pas celui des « gamers « ?
Ça va être la soupe à la grimace chez les ados. Comment, avec leurs amis, leurs camarades, vont-ils pouvoir justifier leur ringardise ? Avec leur coiffure Tin boy, cheveux magnifiquement hérissés et texturés avec undercut, ils étaient, jusque là, au top ! Maintenant il est trop tard pour ressortir les arguments éculés du grands-père prétendant qu’il vaut mieux s’attacher à être qu’à paraitre.
Il y a vraiment de quoi envier ces peuples simples dont les enfants se contentent de si peu… Syrien, Irakiens, Iraniens, Ethiopiens, Malien, ça rime avec « trois fois rien ». Sur les côtes lybiennes, pour oublier leurs viols et leur tortures, les mères africaines – qui ignorent tout, pourtant, de l’éducation positive – achètent, à défaut de black friday, des bouées multicolores à leurs petits et ça leur suffit ; quelques fois, même, ça les sauve ! Ne parlons pas des orphelins Rohingias ou Ouïghours : ils n’ont plus rien, même pas un mot plus haut que l’autre. Il faut dire qu’Allah , dans sa grande miséricorde, l’a voulu ainsi.
Heureusement, chez nous, on fait aussi des cadeaux aux adultes. Mais l’adulte, qui n’a pas forcément reçu une éducation positive, est devenu raisonnable. Il ne se plaint jamais même s’il trouve ce cadeau inutile. ll sait que, souvent, celui qui offre s’est fait plaisir à chercher une idée, à trouver où l’acheter, à en partager le coût avec d’autres, soulagés parce qu’ils sont débarrassés, à bon compte, d’une corvée.
Vivement la décroissance ! Quand on pourra enfin offrir à Noël une paire de pantoufles fabriquée dans son quartier avec les cheveux pris dans la poubelle du coiffeur…